Les recommandations de l'ADA
Auteurs : Miriam E. Tucker, Aude Lecrubier
De Medscape France [Lire] 10 juillet 2013
Un véritable défi pour les patients diabétiques qui choisissent de jeûner pendant le mois saint et qui doivent apprendre comment ajuster leurs traitements et être préparés à cesser le jeûne si nécessaire.
Pendant le Ramadan, les musulmans s'abstiennent de manger, de boire, de fumer et de prendre des traitements oraux du lever au coucher du soleil. Le problème est que le jeûne n'est pas recommandé chez les diabétiques car il augmente le risque d'hypoglycémie, par manque de nourriture et d'hyperglycémie du fait de la pause thérapeutique pendant la journée. L'hyperglycémie peut également survenir si les patients mangent trop après le coucher du soleil.
« Les médecins devraient bien conseiller leurs patients », a commenté l'endocrinologue Saleh Aldasouqi (assistant professeur de médecine, Michigan State University College of Human Medicine, East Lansing, Etats-Unis) pour l'édition internationale de Medscape.
La loi islamique ne requiert pas le jeûne lorsqu'il peut créer un danger physique, mais de nombreux patients diabétiques choisissent de tenter l'expérience. Des recommandations détaillées de l'American Diabetes Association, sur la prise en charge de ces patients ont été actualisées en 2010 . Elles estiment qu'à l'échelle mondiale, plus de 50 millions de diabétiques jeûnent pendant le Ramadan.
Le Dr Aldasouqi passe en revue les points clés de ces recommandations et offre son éclairage en tant que musulman pratiquant et médecin.
Un jeûne possible sous certaines conditions
Le jeûne est particulièrement risqué chez les diabétiques de type 1, chez les femmes enceintes et chez les enfants. Toutefois, les diabétiques de type 1 qui sont bien contrôlés et qui utilisent une pompe à insuline peuvent souvent jeûner en ajustant la quantité d'insuline basale injectée, selon les recommandations.
Pour les patients diabétiques de type 2, recevant des médicaments autres que l'insuline et les sulfamides, le risque d'hypoglycémie est faible. En revanche, comme il est interdit de prendre des traitements oraux pendant la journée, il est conseillé aux patients qui reçoivent de la metformine trois fois par jour de prendre deux tiers de la dose au moment du repas qui a lieu avant le lever du soleil et un tiers de la dose lors du diner, au coucher du soleil. <
SulfamideLes sulfamides à action prolongée devraient être évités. Les sulfamides prescrits en une prise unique quotidienne devraient être administrés au repas avant le lever du soleil.
Les recommandations de l'ADA préconisent aux patients qui reçoivent des sulfamides en deux prises par jour de prendre la dose habituelle au repas du soir et la moitié de la dose au repas avant l'aube. Pour le Dr Aldasouqi, cependant, il est préférable de ne pas prendre le traitement du tout avant l'aube. « On ne sait jamais, vous pourriez faire une hypoglycémie », explique-t-il à ses patients.
Glinides En revanche, les sécrétagogues de l'insuline à action rapide, répaglinide ou natéglinide peuvent être pris avant chaque repas, ajoute-t-il.
Glitazones, incrétines, alpha-glucosidases, bromocriptine Aucun ajustement n'est nécessaire pour les glitazones (non autorisées en France), les inhibiteurs des alpha-glucosidases, les incrétines ou la bromocriptine (pas d'AMM en France dans cette indication).
Insuline basale L'insuline basale devrait être réduite de 30 à 40%. Pour les patients qui sont sous insulines mélangées ou à action intermédiaire, l'ADA recommande de changer pour une insuline basale.
Insuline rapide L'insuline à action rapide devrait être administrée au repas précédant le lever du soleil. L'ADA recommande de n'administrer que la moitié de la dose et le Dr Alsasouqi conseille de ne pas l'administrer du tout : « je suis très préoccupé par le fait que des personnes prennent leur insuline le matin parce qu'ils ne vont rien manger du tout. S'il y a un pic d'insuline, vous ne savez pas ce qui peut se passer. »
Surveiller fréquemment et arrêter le jeûne si nécessaire
Surveiller fréquemment la glycémie est le point fondamental. Aussi, les patients devraient être avertis qu'ils doivent arrêter le jeûne si leur glycémie est en dessous de 70 mg/dl. Si elle augmente au-delà de 250 mg/dl, en particulier chez les diabétiques de type 1, ils doivent arrêter le jeûne et prendre de l'insuline, recommande le Dr Aldasouqi.
Concernant les repas du soir, il faut prévenir les patients de ne pas trop manger. « La modération est la clé. Il ne faut pas sur-remplir un estomac vide », ajoute-t-il.
Enfin, en particulier lorsque le Ramadan a lieu l'été, les patients doivent savoir qu'ils doivent éviter la déshydratation autant que possible. Selon l'endocrinologue, le coup de chaleur est un risque majeur, en particulier, dans les régions chaudes et humides, et lorsque le patient a une pression artérielle peu élevée. Il peut, d'ailleurs, être utile d'ajuster les doses du traitement antihypertenseur et de demander au patient de surveiller sa pression artérielle à la maison.
Le Dr Aldasouqui rapporte qu'il a, lui-même souffert de déshydratation pendant le Ramadan, au point d'adapter ses heures de travail. L'année dernière, il a gardé ses consultations jusqu'à 3 heures de l'après-midi et s'est concentré sur des tâches administratives après cela. « Si à un moment donné, j'avais le sentiment de compromettre les soins des patients, alors je n'hésiterai pas à arrêter le jeûne et à le reprendre plus tard. La loi islamique permet de rattraper le temps de jeûne avant le ramadan suivant », explique-t-il.
Ce sujet a fait l'objet d'une publication dans Medscape.com
Source [Medscape France]
Auteurs : Miriam E. Tucker, Aude Lecrubier
De Medscape France [Lire] 10 juillet 2013
Un véritable défi pour les patients diabétiques qui choisissent de jeûner pendant le mois saint et qui doivent apprendre comment ajuster leurs traitements et être préparés à cesser le jeûne si nécessaire.
Pendant le Ramadan, les musulmans s'abstiennent de manger, de boire, de fumer et de prendre des traitements oraux du lever au coucher du soleil. Le problème est que le jeûne n'est pas recommandé chez les diabétiques car il augmente le risque d'hypoglycémie, par manque de nourriture et d'hyperglycémie du fait de la pause thérapeutique pendant la journée. L'hyperglycémie peut également survenir si les patients mangent trop après le coucher du soleil.
« Les médecins devraient bien conseiller leurs patients », a commenté l'endocrinologue Saleh Aldasouqi (assistant professeur de médecine, Michigan State University College of Human Medicine, East Lansing, Etats-Unis) pour l'édition internationale de Medscape.
La loi islamique ne requiert pas le jeûne lorsqu'il peut créer un danger physique, mais de nombreux patients diabétiques choisissent de tenter l'expérience. Des recommandations détaillées de l'American Diabetes Association, sur la prise en charge de ces patients ont été actualisées en 2010 . Elles estiment qu'à l'échelle mondiale, plus de 50 millions de diabétiques jeûnent pendant le Ramadan.
Le Dr Aldasouqi passe en revue les points clés de ces recommandations et offre son éclairage en tant que musulman pratiquant et médecin.
Un jeûne possible sous certaines conditions
Le jeûne est particulièrement risqué chez les diabétiques de type 1, chez les femmes enceintes et chez les enfants. Toutefois, les diabétiques de type 1 qui sont bien contrôlés et qui utilisent une pompe à insuline peuvent souvent jeûner en ajustant la quantité d'insuline basale injectée, selon les recommandations.
Pour les patients diabétiques de type 2, recevant des médicaments autres que l'insuline et les sulfamides, le risque d'hypoglycémie est faible. En revanche, comme il est interdit de prendre des traitements oraux pendant la journée, il est conseillé aux patients qui reçoivent de la metformine trois fois par jour de prendre deux tiers de la dose au moment du repas qui a lieu avant le lever du soleil et un tiers de la dose lors du diner, au coucher du soleil. <
SulfamideLes sulfamides à action prolongée devraient être évités. Les sulfamides prescrits en une prise unique quotidienne devraient être administrés au repas avant le lever du soleil.
Les recommandations de l'ADA préconisent aux patients qui reçoivent des sulfamides en deux prises par jour de prendre la dose habituelle au repas du soir et la moitié de la dose au repas avant l'aube. Pour le Dr Aldasouqi, cependant, il est préférable de ne pas prendre le traitement du tout avant l'aube. « On ne sait jamais, vous pourriez faire une hypoglycémie », explique-t-il à ses patients.
Glinides En revanche, les sécrétagogues de l'insuline à action rapide, répaglinide ou natéglinide peuvent être pris avant chaque repas, ajoute-t-il.
Glitazones, incrétines, alpha-glucosidases, bromocriptine Aucun ajustement n'est nécessaire pour les glitazones (non autorisées en France), les inhibiteurs des alpha-glucosidases, les incrétines ou la bromocriptine (pas d'AMM en France dans cette indication).
Insuline basale L'insuline basale devrait être réduite de 30 à 40%. Pour les patients qui sont sous insulines mélangées ou à action intermédiaire, l'ADA recommande de changer pour une insuline basale.
Insuline rapide L'insuline à action rapide devrait être administrée au repas précédant le lever du soleil. L'ADA recommande de n'administrer que la moitié de la dose et le Dr Alsasouqi conseille de ne pas l'administrer du tout : « je suis très préoccupé par le fait que des personnes prennent leur insuline le matin parce qu'ils ne vont rien manger du tout. S'il y a un pic d'insuline, vous ne savez pas ce qui peut se passer. »
Surveiller fréquemment et arrêter le jeûne si nécessaire
Surveiller fréquemment la glycémie est le point fondamental. Aussi, les patients devraient être avertis qu'ils doivent arrêter le jeûne si leur glycémie est en dessous de 70 mg/dl. Si elle augmente au-delà de 250 mg/dl, en particulier chez les diabétiques de type 1, ils doivent arrêter le jeûne et prendre de l'insuline, recommande le Dr Aldasouqi.
Concernant les repas du soir, il faut prévenir les patients de ne pas trop manger. « La modération est la clé. Il ne faut pas sur-remplir un estomac vide », ajoute-t-il.
Enfin, en particulier lorsque le Ramadan a lieu l'été, les patients doivent savoir qu'ils doivent éviter la déshydratation autant que possible. Selon l'endocrinologue, le coup de chaleur est un risque majeur, en particulier, dans les régions chaudes et humides, et lorsque le patient a une pression artérielle peu élevée. Il peut, d'ailleurs, être utile d'ajuster les doses du traitement antihypertenseur et de demander au patient de surveiller sa pression artérielle à la maison.
Le Dr Aldasouqui rapporte qu'il a, lui-même souffert de déshydratation pendant le Ramadan, au point d'adapter ses heures de travail. L'année dernière, il a gardé ses consultations jusqu'à 3 heures de l'après-midi et s'est concentré sur des tâches administratives après cela. « Si à un moment donné, j'avais le sentiment de compromettre les soins des patients, alors je n'hésiterai pas à arrêter le jeûne et à le reprendre plus tard. La loi islamique permet de rattraper le temps de jeûne avant le ramadan suivant », explique-t-il.
Ce sujet a fait l'objet d'une publication dans Medscape.com
Source [Medscape France]
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